Poutine et le bouclier américain

Publié le par ELMIR

   
Ce texte est un résumé d’un article qui va paraître dans le mensuel, le Bulletin de l’International. Il présente les raisons du mécontentement de la Russie face au bouclier antimissile américain
 
POUTINE ET LE BOUCLIER ANTIMISSILE AMERICAIN EN EUROPE
 
Le président russe Vladimir Poutine a menacé de pointer de nouveaux missiles vers l'Europe si les Etats-Unis y déploient leur bouclier antimissile. Si le potentiel nucléaire américain s'étend sur le territoire européen, dit-il, nous devrons prendre de nouvelles cibles en Europe". Poutine dénonce la politique américaine en Europe qui risque de transformer ce continent en "poudrière" et consacre l'impérialisme américain. Quinze ans après l'effondrement de l'Union soviétique et la fin de la Guerre froide, la Russie voit d'un très mauvais oeil l'Otan s'étendre vers l'Est et les bases américaines se multiplier à ses portes, de la Roumanie au Kirghizstan. "Regardez simplement la carte - (la défense antimissile mondiale américaine) est en train d'être déployée le long du périmètre de la Russie, et aussi, incidemment, de la Chine", a relevé M. Lavrov. Selon les américains, le bouclier antimissile visant à déployer dix missiles intercepteurs en Pologne et un radar ultra-perfectionné en République tchèque est dirigé non pas contre la Russie mais contre des Etats-voyous comme l’Iran et la Corée du Nord. Poutine rétorque qu’aucun missile iranien n'a de portée suffisante et il est clair que cette nouveauté « nous concerne aussi nous, Russes".

Ce que dit aujourd’hui le Président Vladimir Poutine s’inscrit dans la lignée des dirigeants de l’Union soviétique, partisans de la philosophie de l’armistice nucléaire ou de l’arms control et de la stabilisation de l’équilibre stratégique durant les années soixante et soixante-dix du siècle dernier.

DE QUOI S’AGIT-IL?

Le projet des Etats-Unis consiste à installer en Pologne et en République Tchèque un bouclier antimissile accompagné de stations radars destinées à détecter les missiles balistiques provenant, paraît-il, de l’Iran ou de la Corée du Nord. Les Américains possèdent déjà à l’intérieur de leurs frontières des missiles antimissiles et des stations radars installés en Alaska et en Californie, à Fylingdales au Royaume-Uni et une autre station prévue à
Ce bouclier antimissile est destiné à contrer une menace provenant de la Corée du Nord avec un système mobile basé en mer. Le bouclier antimissile doit aussi prévenir une attaque iranienne contre les forces américaines en Europe ou contre leurs alliés européens. Certains groupes de réflexion militaires américains estiment que l’Iran constitue une menace réelle du fait qu’il possède des missiles balistiques et une artillerie longue portée capable d’atteindre ses voisins de la région comme Israël. L’Iran est en passe de produire des missiles balistiques capables d’atteindre l’Europe du Sud, l’Afrique du Nord et l’Asie du sud d’ici 2010 et même le continent américain en 2015.
Les réactions hostiles des Russes sont fondées sur le fait que le bouclier antimissile américain en Europe de l’Est représente une menace réelle contre leurs propres missiles qui pourraient être détruits sur leur base de lancement. Ils considèrent en outre que ce ne sont pas les dix missiles anti-missiles qui sont en jeu mais la stratégie globale américaine qui peut toujours commencer par dix missiles et finir par cent ou deux cents missiles anti-missiles.

Enjeu principal du débat: l’équilibre des forces stratégiques en Europe

Ce qui est en jeu dans ce débat sur le bouclier antimissile américain en Europe de l’Est, ce ne sont pas les dix missiles et la station-radar. L’enjeu est beaucoup plus important, car il s’agit avant tout d’une remise en cause du principe de l’équilibre des forces en Europe. Ce concept de l’équilibre des forces est né de la division de l’Europe après la fin de la Seconde Guerre mondiale et avec l’apparition de la bombe atomique comme arme de destruction inégalée dans l’histoire des hommes mais aussi et surtout une arme politique d’une redoutable efficacité. La parité nucléaire acquise par l’Union soviétique dans les années cinquante et soixante du siècle dernier eut deux conséquences importantes: l’armistice nucléaire entre les deux puissances nucléaires et l’équilibre des forces en Europe. Mais cet armistice nucléaire ne signifie nullement que la guerre froide s’est terminée mais qu’elle est plutôt entrée dans une nouvelle phase moins dangereuse, celle du statu quo stratégique. Le premier traité fondé sur le principe de la « coopération-compétition » est celui du premier décembre 1959 sur la démilitarisation de l’Antarctique. Puis une série de traités fut conclue entre l’URSS et les USA durant les années soixante et soixante-dix du XXème siècle limitant la prolifération nucléaire. Les conversations sur la limitation des armements stratégiques connues sous le nom de « SALT » ont conduit à la conclusion, le 26 mai 1972, de deux accords: un traité sur les systèmes de défense antimissile et une convention provisoire sur certains armements défensifs. Le traité sur la défense antimissiles a soumis à une réglementation très stricte le développement des systèmes ABM(anti-balistique missile) qui supposent une infrastructure considérable(radars perfectionnés, fusées à tête chercheuse, précision de tir infaillible) au coût très élevé mais générateur d’instabilité stratégique en mettant le territoire couvert à l’abri d’une action de représailles et en garantissant donc l’impunité à l’éventualité première frappe. On comprend dès lors les réactions hostiles des Russes au bouclier antimissile américain en Europe de l’Est, car ce qui est en jeu, c’est moins le nombre de missiles antimissiles que l’impossibilité de riposter de l’attaque à l’attaquant. Ce qui a ravivé encore un peu plus les craintes de la Russie, c’est le retrait des Américains du traité de missile anti-balistique (ABM) en 2002. Le signe de mécontentement de
Quand Poutine attaque violemment la politique américaine à la conférence de Munich en présence du Secrétaire d’État à la défense, il ne fait en réalité que rappeler aux Américains que c’est l’équilibre des forces en Europe qui a maintenu la paix sur ce continent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et que toute rupture de cet équilibre mettrait en péril la paix et la sécurité européennes. Il y a donc une ligne rouge à ne pas franchir.

FAOUZI ELMIR

Mots-clés : Poutine, armement, sécurité, stratégie.
la Russie s’est manifesté par le test d’un missile à têtes multiples(Multiple-warhead MBH) de type RS-24 et l’annonce du développement de nouveaux missiles de croisière pour « maintenir la balance stratégique ». La Russie menace de se retirer du traité conclu entre l’URSS et les USA visant le bannissement des missiles de moyenne portée (intermediate range nuclear forces, INF treaty). Le 26 avril 2007, le président Vladimir Poutine déclare que la Russie pourrait revoir sa stratégie en se retirant du traité sur les armes conventionnelles signé en 1990 et modifié en 1999 après la disparition de l’URSS, un traité ratifié par la Russie mais pas par les USA et d’autres pays de l’OTAN qui continuent de pratiquer la vieille stratégie dite de « linkage » consistant à lier leur ratification au retrait des forces russes de la Georgie et de la Moldavie comme ce fut le cas avec le traité SALT II où les Américains avaient alors lié sa ratification au retrait des troupes soviétiques d’Afghanistan. Malgré la volonté de la Russie de continuer à honorer ses obligations dans le cadre du Strategic Offensive Reductions Treaty (SORT), traité signé en 2002 qui prévoit un mémorandum de réduction substantielle du nombre de missiles et de têtes nucléaires par les USA et la Russie, fixé à un maximum de 2200 d’ici à 2012, le président russe n’a pas manqué de dénoncer par ailleurs les restrictions posées par le traité sur les missiles de moyenne portée(Treaty on intermediate range missiles). Greenland. Les missiles anti-missiles appelés les intercepteurs sont au nombre de 40 en Alaska, 4 en Californie et le plan prévoit l’installation de 10 intercepteurs en Pologne et une station-radar en République Tchèque. À ce bouclier antimissile s’ajoutent 130 intercepteurs installés dans des navires de guerre.
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